Depuis quelques années, nous avons vu apparaître sur nos box internet de nouvelles applications de streaming vidéo. Netflix a fait une arrivée triomphante en novembre 2014 chez Bouygues Telecom, alors que le service de SVoD se lançait en OTT sur le marché français à peine 2 mois plus tôt. Le service est à présent disponible chez les 3 autres opérateurs emblématiques que sont SFR, Orange et Free, mais aussi sur les consoles de jeux et les télés connectées. Puis ce fut au tour d’Amazon Prime Videos de faire son entrée sur les box Free et SFR.
Depuis les débuts de la SVoD, de nombreuses autres plateformes ont également fait leur apparition sur les écrans d’accueil d’applications des opérateurs téléphoniques. Alors pourquoi les opérateurs télécoms misent-ils sur ce mode de consommation de vidéo ?
Les nouvelles générations, qui ont grandi avec internet et le digital, ont une nouvelle relation avec l’objet télévision, qui passe d’un lieu de rassemblement des familles - dans les années 80 - à un objet non identifié pour les plus jeunes. Selon une étude du cabinet américain Leichtman Research Group de 2019, les fournisseurs de chaînes payantes américaines ont vu leurs bases d’abonnés s’écrouler en 2019. Les plus impactés sont notamment les services de télévision par satellite qui ont perdu 3,7 millions d’abonnés en 2019. Ensuite ce sont les câblo opérateurs qui ont subi la concurrence de la SVoD avec une perte totale de 1,56 millions d’abonnés en 2019 contre 920 000 en 2018. Du côté des opérateurs télécom américains, la perte d’abonnés est limitée puisqu’ils perdent 665 000 abonnés en 2019 contre 245 000 en 2018.
Le prix des abonnements aux services câble et satellite, la faiblesse de leurs offres, leur faible capacité à engager leurs communautés, leurs marques vieillissantes et le peu de flexibilité dans leurs modes de consommation comparativement aux services de SVoD contribuent au désintérêt des nouvelles génération pour ce mode de consommation linéarisé. Les bouquets figés et la présence de publicité sont autant de freins qui ne sont pas en accord avec les nouveaux modes de consommation et notamment le tout à la demande. Selon une enquête Médiamétrie intitulée Global SVoD 2019, les abonnés français sont conquis par la souplesse d'utilisation des services SVoD, que ce soit au travers de l'interface, du système d'abonnement ou de l'accès depuis différents appareils. Selon l’enquête, "Les SVoDistes sont très satisfaits de leurs plateformes : en moyenne, ils leur attribuent une note de 8,4 sur 10. Résultat : plus de 9 SVoDistes sur 10 envisagent de continuer à utiliser leur plateforme de SVoD et 10% d’entre eux réfléchissent même à souscrire à un deuxième service de SVoD."
Aujourd’hui il est très facile de souscrire, à la carte, à plusieurs services sur des thématiques qui nous intéressent, sans être prisonnier d’un lot groupé de services annexes dont on ne se servira que peu (voire pas du tout). Les opérateurs télécoms, qui proposent des services TV via leurs abonnements, ont pris conscience de ce virage dans les usages télévisuels des consommateurs. Ils ont aussi conscience que des marques fortes, très identifiées sur leurs communautés ont émergé sur internet, indépendamment d’eux. Il est donc crucial pour eux de référencer ces marques et d’encourager la consommation sur leurs interfaces, avec leurs propres télécommandes. C’est pourquoi ils investissent dans ces partenariats pour attirer de nouveaux clients, plus jeunes, plus exigeants. Ainsi, de plus en plus d’opérateurs ont des designs qui, dès l’écran d’accueil du décodeur TV, proposent des applications intégrées de services de streaming. Sur les stores des box des opérateurs télécoms, on peut également retrouver de nombreuses applications de services SVoD ou d’autres services tels que la location de films ou l’abonnement à un service de replay pour accéder au meilleur des séries et films d’une chaîne, sans la contrainte du jour, de l’horaire ou de la publicité.
En France, une multitude d’acteurs de la SVoD a fait son apparition depuis plusieurs années et en particulier ces derniers mois. Toujours selon l’enquête Médiamétrie datant de 2019, 17,3 millions de Français indiquent avoir regardé au moins un programme sur une plateforme de vidéo à la demande au cours de l'année écoulée. Cette enquête révèle également que les habitudes de consommation varient en fonction de la tranche d'âge, les appareils mobiles (tablettes, smartphones, ordinateurs) étant plébiscités par la jeunesse, tandis que les personnes ayant des enfants à charge préfèrent la télévision. En effet, la moyenne d’âge des SVoDistes français est de 33 ans. Au premier trimestre 2020, la tendance de SVoD s’est confirmée avec une croissance de 45,5%, selon le baromètre du CNC.
Et bien que les consommateurs se désintéressent de plus en plus des chaînes de TV payantes, le téléviseur reste toujours l’écran de prédilection pour accéder à un service de SVoD pour 77% des utilisateurs. C’est pourquoi les opérateurs télécoms ont tout intérêt à s’associer à des éditeurs spécialisés pour gérer ce virage de la SVoD. En effet, développer des partenariats avec des services de SVoD très utilisés et appréciés leur permet d’attirer de nouvelles marques fortes sur leurs communautés et donc des nouveaux publics et de les fidéliser. Tout ceci contribue à leur image de marque : celle d’acteurs modernes qui accompagnent les changements de la société.
Pour les éditeurs de services de niche en particulier, s’associer avec un opérateur télécom représente l’assurance d’avoir accès à une base de plusieurs millions d’abonnés et donc potentiellement de recruter de nouveaux consommateurs via un canal plus grand public : de futurs abonnés qui n’auraient peut-être jamais entendu parler du service. La force d’un opérateur télécom est encore énorme. l’écran du salon génère des millions de vus et la transformation de cette audience vers des services payants est une source importante de visibilité et de revenus. C’est clé pour un éditeur d’être référencé sur un store de box internet.
La SVoD a de beaux jours devant elle. Les acteurs de l’audiovisuel n’ont d’autre choix que de s’adapter et de se renouveler s’ils veulent conserver une place sur ce marché et fidéliser leurs abonnés. Dans le cas contraire, les consommateurs, sur sollicités et toujours plus exigeants, n’hésiteront pas à zapper.